Accompagner le changement : courbe du deuil et intelligence émotionnelle

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Accompagner le changement en période de crise:  la courbe du deuil et l’intelligence émotionnelle sont des outils particulièrement intéressants pour permettre de traverser le changement et se connecter à soi pour mieux appréhender ce que nous vivons, et tout simplement comprendre que tout ce que nous vivons est absolument « normal ».

Nous vivons une période inédite et extraordinaire , nombreux sommes-nous à traverser cette épreuve de différente façon. Pour mieux comprendre comment fonctionne la traversée du changement pour vous et vos collaborateurs, je vous propose d’explorer la courbe du deuil et également comment utiliser les émotions comme guide pour être à l’écoute de vos ressentis.

La courbe du deuil a été modélisée par Elisabeth Küber-Ross, psychiatre helvetico-américaine spécialisée dans l’accompagnement des personnes en fin de vie, et peut être appliquée à toute situation dans laquelle nous sommes confrontés à un changement. Changement qui par nature implique un avant et un après ce qui signifie que nous devons nous dessaisir d’une situation initiale pour permettre la mise en place d’une nouvelle situation. Ce changement peut être voulu ou imposé, toutefois dans les deux situations nous traversons, chacun à notre niveau, les 5 étapes de la courbe du deuil car dans tout changement, ceci implique par la même une perte, qu’elle soit humaine, matérielle ou psychologique.

En préalable à cette explication, je tiens à rappeler que nous ne sommes pas tous égaux par rapport au changement. Ainsi l’être humain, pour pouvoir survivre a mis en place des stratégies d’homéostasie, de la stabilité du système permet de maintenir le système dans sont état actuel. La crise que nous traversons vient bouleverser le paradigme d’un monde qui « semblait fonctionner ». Je mets des guillemets car, cette crise vient plutôt nous confronter à tous les dysfonctionnements d’un paradigme dans lequel l’homme par sa toute puissance pense être en mesure de tout maitriser. Or nous ne maîtrisons finalement pas grand chose, un grain de sable dans notre humanité et c’est tout un système qui déraille…. Notre soi-disant « modèle » économique est bien fragile, mais là n’est pas mon propos. Donc dans le changement, chacun peut envisagé les choses sous des angles différents en fonction de sa personnalité, de son éducation, de la connaissance qu’il de lui-même, du développement personnel déjà mis en place.

courbe du deuil

La modélisation réalisée par Elisabeth Kübler-Ross est particulièrement intéressante car elle associe les différents stades émotionnels par lesquels passe une personne quand elle traverse toute forme de « perte catastrophique ».

Ainsi, se rapprocher de ses émotions permet de mieux envisager dans quelle étape nous nous trouvons et permettre soit de passer à l’action si nous sommes dans la phase ascendante de la courbe du deuil soit de prendre du temps, d’être à l’écoute de soi, de prendre soin de soi, d’explorer son blocage qui empêche de traverser l’étape dans laquelle nous sommes bloqués. En effet, dans la phase descendante notre énergie est au plus bas et empêche tout initiative de création. Il s’agit d’accepter cela, car je souhaite aussi préciser que chaque personne est tellement différent face au changement, chacun peut en fonction de son passé, de sa personnalité traverser les étapes de manière très différentes et c’est en cela que le rôle du manager/dirgeant est d’accepter la différence et de comprendre où en est son collaborateur pour l’aider à passer le cap de son blocage.

Je précise aussi que bien que linéaire d’apparence pour en faciliter la lecture, la courbe du deuil peut aussi être plus circulaire avec des retours en arrière sur une phase. C’est tout à fait normal et ce n’est pas grave, acceptez tout simplement que cela est et tentez d’identifier quel est le déclencheur de ce retour en arrière.

La courbe du deuil et les émotions en 5 phases

Phase 1 : Le Choc/Déni

L’apparition d’une nouvelle, nous sommes sidérés par la nouvelle et pouvons refuser ce changement. Réactions du type : « ce n’est pas vrai/ ce n’est pas possible/ c’est une blague » Elle peut passer par une phase de sidération, paralysé par les émotions, nous pouvons être incapable de raisonner et de réagir « normalement », voir tourner en boucle.

Pour le manager : c’est une phase d’information, il s’agit d’être clair sur la transformation à venir, il s’agira également d’user d’une fine observation des signaux faibles (ou forts) d’une réaction démesurée. L’écoute active et l’empathie seront vos alliés dans cette étape.

Ne pas oublier que chacun est différent et accepter de manière inconditionnelle cette différence.

Prendre soin de donner du sens et partager la vision avec son équipe.

Phase 2: Colère/Peur

Tout le monde ne passe pas forcément par toutes les émotions et chaque émotions peut être vécues différemment avec plus ou moins de temps pour chaque émotion.

Une fois le choc encaissé, la nouvelle laisse place à la colère et/ou la peur de l’inconnu. C’est en général une période pendant laquelle nous allons commencer à nous révolter, nous questionner et parfois culpabiliser, bref, tenter de résister.

 » Je m’y oppose totalement !  » ;  » Ça ne se passera pas comme ça !  » ;  » C’est totalement stupide !  » ;  » C’est pas juste !  » ;  » Je ne comprends pas  » ; « Comment va-t-on faire ?  » « virus de m…. » « c’est la faute du gouvernement »….

Pour le manager : c’est une phase où nous devons guider le collaborateur pour l’accompagner à dépasser le blocage de la peur et/ou de la colère.

Bien sûr que ce n’est pas facile au quotidien de devoir désamorcer ces émotions, alors je partage avec vous quelques étapes que vous pouvez utiliser :

1-  Identifier quelle émotion exprime votre interlocuteur
2-  Accueillir ces émotions et au passage être au clair avec les siennes:))
3- Faire preuve de bienveillance par une écoute active, réformulation, questionnement ouvert. La colère en tant que stratégie de résistance ne doit pas être désamorcée par le raisonnement, utiliser des techniques de Communication Non Violente .

Face aux peurs, inciter les collaborateurs à verbaliser leurs inquiétudes:« J’entends que tu exprimes une crainte (ne pas utiliser le mot peur dans un premier temps car peut être trop violent pour certain d’être confronté directement à leur émotion), quel est le danger? laisser le collaborateur déverser ses craintes jusqu’en entonnoir à la source racine de leur peur.

Les émotions nous parlent de nos besoins. Chercher à identifier son besoin est un premier par vers la prise de conscience de son blocage.

différents besoins

4- Valider aussi à cette étape de quelles ressources il dispose (interne à soi) ou externe (entourage, collègues, médecin, manager…) et faire prendre conscience que le collaborateur n’est pas seul et qu’il possède aussi des ressources en lui.
5- Déceler dans quel degré d’autonomie la personne est en capacité d’accepter son état émotionnel et de pouvoir s’en saisir.

Phase 3 : la tristesse/dépression

« Un homme est aussi malheureux qu’il pense l’être » Sénèque.

La perte est bel et bien réelle, il en résulte une grande nostalgie de l’avant ainsi qu’une immense appréhension quant au futur, qui s’accompagnent souvent d’un profond abattement. Cette période est celle où notre énergie est au plus bas, elle ne permet pas encore la construction d’un après mais si elle est acceptée comme une étape à vivre en pleine conscience alors elle sera d’autant plus facile à traverser. Le corps peut être aussi soumis à rude épreuve et faire preuve d’une grande fatigue suite au séisme vécu précédemment.

C’est une étape charnière dans le processus car elle permet le passage vers une phase plus dynamique tournée vers le futur, vers le positif.

Pour le manager: il est important d’accepter que cette étape existe à un nouveau d’intensité plus ou moins fort en fonction du changement et de la personne. Humanisme et bienveillance resteront vos principaux alliés dans ce processus. C’est une phase qui peut être la plus longue dans le processus car c’est la dernière « barrière » avant la phase d’acceptation du changement, dernier bastion de lutte. C’est aussi l’étape où le collaborateur peut être confronté à la dépression, l’abattement. Vous pouvez vous faire aider par une personne tierce (psychologue du travail, coach…).

Se connecter avec sa tristesse pour accepter la perte n’est pas toujours facile, prise de recul sur la perte, rationaliser, visualiser d’autres options – la nature n’aimant pas le vide par quoi pouvons-nous remplacer cette perte, utiliser la psychologie positive, valider avec votre collaborateur que vous entendez sa peine, « tu as le droit d’être triste, peiné… »

Continuez à prendre soin de vous aussi pour ne pas faire l éponge ou être trop distant dans cette phase. Tout le monde n’est pas à l’aise avec l’expression de la tristesse dans le monde de l’entreprise qui est souvent perçu comme un signe de faiblesse. Où en êtes vous avec votre propre capacité à accepter la tristesse.

Phase 4 : Quête de sens et renouveau

Dans cette phase, nous attaquons la phase ascensionnelle tournée vers le positif et le futur. Nous laissons le passé derrière nous et sommes prêt à envisager des nouvelles choses.
Les signes précurseurs d’une amorce d’acceptation se distinguent par des discours de type « marchandage » ou « négociation » :

 » Ok, mais laissez-moi un peu plus de temps  » ;  » Ok, mais à telle condition  » ;  » Bon… Puisque c’est ainsi…  » ;  » De toute façon, je n’ai pas le choix…  » ;  » Finalement, je peux peut-être y trouver mon compte  » ;  » Je veux bien essayer, mais si ça ne fonctionne pas, on recommence comme avant « , etc.

Pour le manager :C’est une phase d’encouragement qu’il s’agit de mettre en oeuvre pour capitaliser sur les premiers signes de négociation.

Donner du sens dans le changement, rappeler la vision, les points positifs de la transformation….

Et toujours prendre soin de soi pour permettre l’accompagnement de ses collaborateurs, être à l’écoute de ses propres forces et faiblesses. Trouver des ressources pour soi pour être au mieux dans l’accompagnement de ce changement qui demande aux managers beaucoup d’énergie. Etre bienveillant avec soi et être modélisant pour les autres.

Phase 5 : Sérénité, nouvelles forces

C’est l’étape de l’intégration, nous avons compris le changement et intégré celui-ci, nous sommes en capacité en terme d’énergie de pouvoir mettre en place de nouvelles actions.

Pour le manager : c’est le temps de la reconnaissance, c’est le temps important du feedback positif sur les nouvelles compétences acquises. Organiser un temps de rétrospective pour souder le collectif autour des réussites, des apprentissages, de ses ressources pour dépasser les difficultés. Célébrer le travail accompli pour ancrer en équipe le passage de cette nouvelle organisation.

Je vous partage ma problématique aujourd’hui face à l’épidémie

Par exemple pour ce que nous vivons face à l’épidemie: je suis bloquée dans la phase de peur et toutes les informations contribuent à me ramener dans la peur. Alors il s’agit de faire face à cette peur quand elle se présente, de quoi ai-je peur? est-ce rationnel? peur de la maladie pour moi et pour mes proches? peur de perdre finalement cet équilibre dans lequel je vivais? peur de souffrir, peur de la perte de mon CA, peur de rester enfermée, peur face au manque de visibilité sur demain, peur de ne pas maitriser, peur face à mon impuissance….. Des dizaines de motifs d’avoir peur certains plus rationnels que d’autre. Toutefois aujourd’hui face à cette peur, comme notre cerveau reptilien nous l’a si longtemps inculqué pour pouvoir survivre, 3 solutions : la fuite, l’attaque ou l’immobilisme. Dans quel état suis-je face à cet évènement me permet de mieux comprendre mon blocage et trouver des ressources pour dépasser cette peur. Ainsi ma réaction est plutôt l’immobilisme, ne pas bouger en attendant que cela passe, mon antidote et les ressources que je mets en place pour permettre de rationaliser la peur va être l’action : faire quelque chose comme écrire cette article.

J’ai écouté un podcast d’un astronaute Romain Charles sur Europe 1 « confiné » pendant 520 jours pour simuler le voyage sur Mars et il nous conseille de s’occuper l’esprit et aussi, parce que eux aussi ont des hauts et des bas : d’en parler quand ça ne va pas. C’est pourquoi je pense qu’en ces périodes de changement, il est important de mettre en place des groupes de parole pour permettre à chacun d’exprimer ses difficultés, ses doutes…

Bien sûr, cela ne se fait pas avec une baguette magique, mais pas à pas en étant bienveillant avec soi et avec les autres.

Et vous, vous en êtes où dans votre courbe du deuil?
Choisissez un évènement marquant dans votre vie professionnel (ou personnel).

  • Prenez quelques instants pour visualiser cet évènement, et respirer tranquillement à l’écoute de votre corps.
  • Quelle(s) sensation(s) dans votre corps?
  • A quelle émotion pouvez-vous rattacher cela?
  • Positionnez vous sur la courbe du deuil.
  • Vous sentez-vous bloqué dans cette étape?
  • De quoi avez-vous besoin en cet instant?
  • Avez-vous la possibilité d’exprimer votre besoin? A quelle valeur est relié ce besoin? Connectez vous à cette valeur, a t-elle est bafouée?
  • Acceptez l’émotion du moment, regardez là et remerciez là pour ce qu’elle vient vous dire parce qu’elle parle de vous.

Comment vous sentez-vous après cet exercice?

Et pour mieux comprendre ses émotions, je vous partage un lexique des émotions. En effet il est souvent difficile de bien nommer notre émotion et son intensité car notre vocabulaire est la plupart du temps très limité.

En utilisant les bons mots, vous serez à même de mettre plus de consciense sur vos maux.

Téléchargez le vocabulaire des émotions ICI.

Régulièrement dans mes accompagnements, j’entends « je suis stressé.e » mais que veut dire ce mot fourre tout : est-ce de la fatigue, de l’épuisement, de la peine, de l’irritabilité….? Je vous invite à plus de conscience sur vos ressentis pour mieux appréhender vos émotions et vous en servir comme une force et non plus les subir.

Si vous aussi vous souhaitez travailler sur vos émotions, sur la courbe du deuil individuellement ou en équipe, je suis à l’écoute de votre demande : delphine@biendanssonjob.fr
ou prenez RDV sur mon agenda : https://calendly.com/delphine-biendanssonjob/rdv-faisons-connaissance

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